35/ Bonjour. Quelle est la différence entre un Maître et un Professeur? Est-il correct, à âge plus ou moins identique, sans aucun manque de respect, de tutoyer son enseignant? Merci pour votre réponse.
David
La notion de Maître, la différence entre un Maître et un Professeur ont été développées dans le livre Forger le Dragon, vous pouvez vous y reporter utilement. Extraits :
« Un Maître a le souci constant et l'obligation de transformer le disciple par son enseignement en tendant à recréer chez ce dernier une harmonie intérieure, de l'unifier, de l'épanouir à son tour. »
(…)
« Dans la relation de professeur à élève, le professeur transmet des connaissances sans toujours pouvoir se soucier de ce que l'élève en fera par la suite. »
Est-ce normal de tutoyer son enseignant ? Est normal ce qui est conforme à la norme. Localement, dans tel club le tutoiement est la norme de rigueur, souhaitée même par le professeur, auquel cas personne ne s'en offusque et tout le monde trouve cela « normal ». Ailleurs c'est le vouvoiement qui prévaut et là tout tutoiement choque.
Dans l'enseignement traditionnel des arts martiaux le tutoiement est exclu. En Asie et notamment en Chine, les jeunes vouvoient les plus âgés, les élèves vouvoient les professeurs. Le respect, la politesse, la bienséance sont naturellement présents en tant qu'héritage culturel du confucianisme qui imprègne et règle les rapports des individus entre eux, dans la communauté que constitue une école d'arts martiaux comme au sein plus large de la société. Chaque individu, chaque élève, est ainsi amené à prendre humblement conscience de la place qui lui est dévolue au sein de l'école, de la famille, de la société et de l'univers. L'éducation de l'élève est, dans l'enseignement traditionnel des arts martiaux, aussi important que l'acquisition de techniques guerrières. Elle a pour rôle de ne pas favoriser le développement d'un ego surdimensionné chez l'élève.
La notion de tutoiement et vouvoiement ont en occident une autre connotation qui a évoluée avec notre société. Plusieurs langues n'ont pas de vouvoiement : anglais, hébreu, suédois, arabe, les Grecs anciens et les Romains (en latin classique il n'y a pas de pluriel de politesse et le tutoiement était d'usage même dans les plus hautes classes de l'aristocratie) ne l'utilisaient pas, ou que dans des circonstances particulières telle que s'adresser à un triumvir (magistrat romain partageant avec deux collègues certaines fonctions publiques), car en s'adressant à lui on s'adressait au trois.
Le vouvoiement, en usage en France depuis le moyen âge, est un mode de communication par défaut, lorsque on ne sait trop comment se positionner par rapport à l'autre, ou que l'on ne se sent pas suffisamment familier avec lui, avant d'être une expression de respect, de déférence. Aujourd'hui tutoyer peut paraître désobligeant pour les uns alors que vouvoyer sera considéré ringard et déplacé par les autres, car la familiarité envahie maintenant le plus souvent les échanges avec ceux que l'on ne connaît pas, notamment sur le net et ses forums.
La rencontre de la Tradition et des mœurs modernes trouble sûrement, il appartient au professeur ou au Maître de discerner, d'expliquer et de se positionner.
F. Fournier
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